Expat aux USA : Le jour d’après 4


Lundi, j’ai posté la photo ci-dessous sur Instagram, pour célébrer la fin imminente du Trump show. Je l’avais prise il y a quelques temps à Soho et je me souviens qu’elle m’avait fait sourire. Ces dessins sont monnaie courante à NYC, ça fait des mois qu’ils fleurissent aux quatres coins de la ville. Bref, l’occasion était donc propice à un ton léger. La course à la présidentielle a été particulièrement longue et riche en idiotie cette fois-ci. J’étais soulagée de voir le cirque médiatique toucher à sa fin et je rêvais d’un jour où Trump ne serait plus qu’un lointain souvenir qu’on associe seulement au mot Tower.

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Art by Con$umr (@consumerart sur Instagram)

Aux Etats-Unis, on est moins pudique qu’en Europe sur certains sujets. Les Américains vous parleront tout naturellement du montant de leur salaire ou de la couleur électorale qui fait battre leur coeur.

Ici, c’est presque rare de voir un commerce qui ne fait pas campagne. L’institut de beauté à côté de chez moi promeut l’épilation nasale à l’aide d’une vilaine caricature poilue de Trump. Une célèbre marque de vaisselle a lancé une ligne de produits à connotation politique très piquante.

Hier soir, j’ai commencé à regarder les élections d’un oeil à la télé. Hillary va gagner, ce n’est pas comme si le suspens était à son comble. Même si l’affiche électorale n’est pas des plus excitantes, ce sera une victoire historique. On va avoir une présidente à la tête des USA. Un nouveau chapitre palpitant dans les livres d’histoire avec une femme pour héroine. En tant que femme, c’est une idée qui m’emballe. Je ne connaîtrai pas l’égalité hommes-femmes de mon vivant mais ça, c’est un grand pas. Les premières dames ont longtemps été considérées comme des potiches et madame Clinton allait prouver au monde le contraire. La dynastie des Clinton était prête à faire son entrée à la Maison Blanche, quelle belle image.

Alors qu’on aime Hillary ou pas, la question ne se pose pas : Donald ne sera pas président. Ce ne serait même pas plausible au cinéma…à moins qu’il ne s’agisse du dernier film de Sacha Baron Cohen.

Puis au fur et à mesure, les résultats sont serrés, trop serrés. Les candidats se retrouvent au coude à coude et c’est Donald qui mène la danse. Mais il est encore tôt dans la soirée. Ce n’est probablement qu’une petite frayeur avant que la tendance ne s’inverse. Les votes se clôturent peu à peu. Les prédictions catastrophes qui ont eu lieu tout au long de la soirée sont de plus en plus appuyées par les chiffres. What the hell ? Les yeux rivés sur la télé, les textos des copains commencent à arriver. Personne n’y croit, personne ne veut y croire.

Il est une heure du matin. J’ai mal à la tête et je lutte contre la fatigue mais je ne peux pas me résoudre à aller au lit. J’attends impatiemment un retournement de situation qui n’arrivera jamais. Serait-ce la plus grande supercherie de l’histoire de la télé ? Une caméra cachée de mauvais goût à échelle mondiale ? Les chiffres rouges montent bien plus vite que les bleus, j’ai l’impression d’assister à un énième épisode du juste prix. Et merde. A deux heures trente, je capitule. Ce n’est pas fini mais on sait que ça l’est pour Hillary. Je vais me coucher le coeur lourd, première nuit de ce cauchemar des temps modernes. Et je pense à l’Europe qui vient de se réveiller, assistant en live au sacre de Trump.

Je m’endors en sachant exactement comment je me réveillerai mercredi matin. Comme un lendemain de veille, couplé d’un coeur en mille morceaux et d’une envie de me pincer le bras toutes les dix secondes. Se demander si ce mauvais rêve est terminé, encore et encore.

La dernière fois que j’avais ressenti ce sentiment, c’était en mars dernier, quand ma douce Bruxelles s’était faite attaquée. Après avoir blessé ma ville natale, on s’en prenait aujourd’hui au pays où j’avais choisi de faire ma vie.

J’ai mal, j’ai honte, j’ai peur, je me sens trahie. Hier il faisait beau et ce matin il fait gris. La météo n’aurait pas pu être plus de circonstance à NYC : il fait frais, humide, pluvieux et gris.

Je repense au passé, à comment on a pu en arriver là. Puis les paroles d’une chanson qui date d’il y a une quinzaine d’années sonnent étrangement justes. “Ce pays que j’aimais tant serait-il, finalement colosse aux pieds d’argile…”

New York et moi, ça a été l’amour au premier regard. Ce qui m’a directement séduite dans cette ville si cosmopolite, c’est l’ouverture d’esprit. La différence y est synonyme de richesse et c’est une sensation qui n’a pas de prix. C’est le pays de l’american dream, tout y est possible. Même le pire apparemment.

Depuis hier, tout est différent. Notre joli monde en technicolor vient de virer au noir et blanc. On a sali l’Amérique, ce symbole de liberté et berceau de tant de batailles qui ont façonné notre société occidentale.

Bien sûr c’est NYC et la vie ici n’est pas représentative du reste du pays. On est bien loin de l’Amérique profonde.

Mais s’il-vous-plaît, cessez le jeu des amalgames. Combien de messages peu réfléchis et d’âneries en tout genre ont circulé sur les réseaux sociaux ?

Ce n’est pas parce qu’on vient du fin fond des USA qu’on vote Trump. Je partage la vie d’un Américain originaire du Kansas et dans sa famille, personne ne vote républicain. La première chose que ma belle-mère nous a dit au téléphone ce matin, c’est qu’elle pensait se réveiller et pouvoir annoncer à sa petite-fille de cinq ans que nous avions une femme pour président. Je ne sais pas ce qu’elle lui a dit finalement, j’espère qu’elle aura trouvé les mots justes pour expliquer à un enfant le monde dans lequel on vit maintenant.

On a aussi droit au traditionnel “les Américains ont choisi Trump donc ils n’ont que ce qu’ils méritent. C’est un peu tard pour pleurer ”. Ne soyez pas ridicules et pensez aux millions de personnes qui ont voté et fait campagne pour le camp adverse. Sans oublier l’indémodable “ils sont tellement cons les Américains de toute façon”. Un peu simpliste comme raisonnement, non ? Oui des cons il y en a (malheureusement plus qu’on ne l’imaginait) mais on les retrouve partout.

Oui les Etats-Unis doivent avoir honte. Oui les Américains doivent se remettre en question, unir leurs forces pour traverser cette épreuve, comprendre comment ils en sont arrivés là et surtout faire en sorte cela ne se reproduise jamais. Mais ne mettez pas tout le monde dans le même panier, s’il-vous-plaît.

Qui a dit qu’une femme, et de surcroît une ex première dame ne pouvait pas endosser la responsabilité de chef d’état ? Si ce n’est pas Hillary, ce sera peut-être une autre, qui sait ?

Michelle, on t’attend dans quatre ans.

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About The Lazy Frenchie

Journaliste et blogueuse, Aurélie vit à New York depuis 2011. Elle a travaillé pendant de nombreuses années dans l’événementiel et plus spécifiquement pour les industries de la mode et du luxe. Quelques fashion weeks plus tard, elle partage aujourd’hui son emploi du temps entre une école de langues à Tribeca, où elle enseigne le français, et l’écriture d’articles pour divers sites et blogs féminins. Ses sujets de prédilection sont New York, les voyages, la mode, la déco, le bien-être et tout ce qui touche de près ou de loin à la cuisine. Suivez-la en image : @the_lazy_frenchie. Pour plus d’informations, contactez-la à l’adresse suivante: aurelie@thelazyfrenchie.com

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4 thoughts on “Expat aux USA : Le jour d’après

  • Nadimi

    Le probleme je pense, est Hillari pas simplement le fait que ça soit une femme.
    L’amerique etait prête pour une femme à la maison blanche, mais pas elle.
    Si Michelle Obama s’ etait presentee, je suis certaine qu’elle aurait gagnee.

    4 ans à tenir !!
    Puis bon, il ne pourra pas faire autant de dêgats que se qu’il a promis durant sa campagne, non ?

  • Angelika

    Avant de partir me coucher j’avais dit à mon chéri ça sera Trump a quoi il m’a répondu mais non à 99% hilary va gagner ..
    Non pas que j’aurai pas aimé une femme présidente pour les États Unis mais pour moi elle a été trop mise en avant tout de suite
    Trump c’est un peu le rêve américain façon dallas et les gens voulaient du changement .
    Après je m’inquiète pas trop en 4 ans il aura pas le temps de mettre tous ce qu’il veut en place , et l’avortement c’est pas de mal à veille qu’il réussira à l’interdir des femmes ce sont battues avant elles recommenceront maintenant ! ( ces aussi ça protéger ces convictions il faut être prêt à recommencer n’importe quand ) La seule chose de positive je l’espère en quatre quil pourras faire c’est pour l’économie de l’Amérique 🙂
    Et puis il change déjà son discours qu’il contraste quelque peux avec la réalité 😊😊